Il y a quelques années, je ne me considérais pas particulièrement consommatrice au quotidien, et je détestais faire les magasins. Et pourtant, tous les ans, à la même période, je me transformais ; j’étais prise d’une folie compulsive : Holiday season.
La première chose que vous devez savoir sur moi, c’est que j’adore Noël. Pas du genre « oh c’est sympa ces moments en famille le 24 ». Non, moi je voudrais vivre dans une boule à neige et chevaucher Rudolf le renne all night long (en tout bien tout honneur bien sûr).
Alors tous les ans, la période des fêtes pour moi c’était achats, achats, achats, achats inutiles : plaids, bougies, nouvelles décorations pour le sapin, nouveaux draps pour le lit, nouveaux coussins pour le canapé, etc… Tout sur le thème de Noël bien évidemment, le tout avec un CDD d’utilité qui prenait fin début janvier. Et comme, je voulais TOUT, et ne me restreindre sur RIEN, je me rendais dans des grandes enseignes à prix cassés.
La deuxième chose que vous devez savoir sur moi, c’est que je ne jette RIEN. Me séparer d’un objet quel qu’il soit me donne l’impression de me séparer d’un souvenir, de perdre quelque chose définitivement sans jamais pouvoir le récupérer. « Ça peut toujours servir » devrait être écrit sur ma tombe en lettres d’or. C’est peut-être cela qui m’a sauvée : j’accumulais, j’accumulais… Puis d’un coup STOP. Ces objets qui devaient me procurer de la joie ont commencé à m’angoisser. Plus rien ne rentrait sous le lit, dans les placards, dans la cave. Je me suis vue, là, suffocant sous un tas gigantissime de merdouilles.
Ce n’était pas qu’une impression : 2,5 tonnes, c’est en moyenne le poids total de tous les objets accumulés chez chacun d’entre nous. Et c’est l’équivalent d’un gros hippopotame (peut être deux dans mon cas, dont un qui chante « mon beau sapin » en buvant du vin chaud).
Encore plus fou, c’est 45 tonnes de matières premières qu’il a fallu extraire, exploiter et transporter pour fabriquer ces objets. Soit 8 gros éléphants 🐘.
Mais je réalisais par la même occasion, qu'au delà de cette folie de Noël, je consommais bien plus que ce que j'imaginais. Alors oui, je ne faisais certes presque jamais les magasins mais j'étais une grande adepte des commandes en ligne. Je commandais à tout va, c'était tellement facile; le même vêtement en trois couleurs si j'avais un doute puisque je retournerai en un clic si cela ne me plaisait pas.
C’est cette accumulation, cette montagne d’objets inutiles qui m’a poussée à prendre conscience de mon impact et ma participation à cette surconsommation généralisée.
Mais aujourd’hui, Vendredi noir, me rappelle à mes vieux démons et me donne l’impression qu’on n'apprend pas de nos erreurs.
Black Friday c’est un peu le coup d’envoi de la saison des fêtes, la pire période de l’année en termes d’exploitation, de pollution et de gâchis. Une coupe du monde organisée au Qatar toutes les fins d’année à laquelle on participe avec le sourire, des schoko-bons plein le gosier.
Originaire des Etats-Unis, cette tradition qui veut que les enseignes et commerçants bradent leurs prix pendant 24h, le dernier vendredi de novembre arrive en France dans les années 2010. Depuis quelques années, ce qui n’était qu’un vendredi s’étend maintenant tout le weekend, et voit arriver le Cyber Lundi (petit cousin du vendredi noir mais en ligne!).
Quel est le problème ? L’occasion de faire des économies me direz vous !
Cher lecteur, assieds toi faut que je te parle. Tu vas passer ta journée dans le noir. Oui je le sens, je le sais ils se foutent de nous!
Toute la semaine, comme vous, j’ai été submergée par les messages promotionnels me poussant à acheter toujours plus d’objets dont je n’ai pas besoin. Partout, tout le temps, dans la rue, à la télé, par mail, par texto, sur les réseaux… on ne peut échapper à la pression marketing. De quoi réveiller un bon gros FOMO (Fear Of Missing Out) des familles qui te donne l’impression d’être le seul nigaud à rater l’occasion du siècle.
Et pourtant on le sait bien, ces prix cassés le temps d’une journée reflètent surtout des prix injustes toute l’année.
Ça n’empêche pas le vendredi noir d’enregistrer des ventes plus de deux fois supérieures à une journée lambda d’octobre. C’est d’autant plus d’emballage et de transport en un seul jour. Sans parler, du nombre de retours phénoménal engendré (et oui, des achats réalisés en vitesse, sous la pression, et ne répondant à aucun besoin).
Au-delà de l’impact environnemental, Black Friday c’est aussi des délais de livraison toujours plus compétitifs, des volumes pharaoniques et donc une chaine logistique et une chaine de production sous pression. Rien pour arranger les conditions de travail déjà précaires des salariés des grandes enseignes de distribution...
Et du coup ? On fait quoi ? On s’enterre dans une cabane au fond du jardin car il n’y a plus d’espoir ? NON !
Reprenons mes histoires de Noël, il m’aura fallu atteindre le trop plein pour repenser mes habitudes de consommation. Mais au moins c’était un point de départ : Arrêter les nouveaux achats, faire du neuf avec du vieux et donner ce que je n'utilisais pas.
Alors, je ne me suis pas MarieKondoiser dans la nuit, on ne change pas du pâté en foie gras tout de même. Mais il faut bien commencer quelque part, et changer chacun à notre échelle notre façon de consommer semble être la seule solution à notre portée, le seul moyen de contester.
Et la bonne nouvelle c’est que nous sommes de plus en plus sur ce chemin : 76 % des Français déclarent se tourner vers des modes de consommation plus responsables, d’après une étude de l'ADEME et GreenFlex parue au mois d’octobre. Alors en avant !
Un petit pas pour chacun un grand pas vers une consommation plus raisonnée!
Signé L.L